La progression “2-5-1” (ou “ii-V-I”) est utilisée dans une grande variété de genres musicaux, y compris l’harmonie jazz où elle est omniprésente.
Dans cet article, nous allons aborder les choses de façon concrète : comment se repérer afin de pouvoir la jouer sur la totalité du manche de la guitare.
Cela implique, comme très souvent en musique, de savoir identifier les intervalles sur son instrument, donc ici sur le manche de la guitare.
Vous allez voir qu’avec l’aide des couleurs, cela devient un vrai plaisir !
D’où viennent ces chiffres “2-5-1” (ou “ii-V-I” selon la notation) ?
Si vous avez déjà un certain niveau, vous le savez déjà, cela découle de l’harmonisation de la gamme majeure.
Pour ceux qui ne connaissent pas, “harmoniser une gamme” consiste à construire des accords en combinant les notes de cette gamme. Si on compare les notes de la gamme à des lettres, les accords sont les mots que l’on peut fabriquer avec.
Comme cela a largement été traité dans d’autres articles, nous allons nous limiter ici à l’essentiel.
A partir des notes de la gamme majeure, on peut construire 7 familles d’accords, que l’on appelle des degrés.
Par exemple :
- Quand on part de la première ou de la quatrième note de la gamme, on obtient des accords de type “majeur septième majeure” (en abrégé : maj7 ou 7maj, M7 ou 7M, Δ7 ou simplement Δ).
- Quand on part de la seconde, de la troisième ou de la sixième note de la gamme, on obtient des accords de type “mineur septième” (en abrégé : min7, m7 ou -7).
- Quand on part de la cinquième note de la gamme, on obtient des accords de type “septième” (en abrégé : 7).
- Et quand on part de la septième note de la gamme, on obtient des accords de type “mineur septième quinte diminuée” ou “demi diminué” (en abrégé : min7b5, m7b5 ou Ø).
On peut cependant enrichir ces formes de base en leur ajoutant des notes supplémentaires (9, 11, 13…).
Si l’on reprend ces degrés dans un tableau récapitulant toutes les tonalités possibles, on obtient le tableau d’harmonisation de la gamme majeure dont on se sert extrêmement souvent :
N.B. :
- Pour alléger le tableau, les notes altérées sont exprimées seulement en version “bémol”. A vous de les convertir si nécessaire : Réb = Do#, Mib = Ré#, etc.
- Les degrés mineurs sont indiqués par des lettres minuscules (exemple : ii au lieu de II).
Vous l’avez certainement compris maintenant : “ii-V-I” se réfère aux colonnes I, ii et V du tableau ci-dessus.
Par exemple, en tonalité de Do majeur, on regarde la première ligne du tableau :
- degré I : accords dont la fondamentale est Do (C, CM7, CM9, Csus4…).
- degré ii : accords dont la fondamentale est Ré (Dm, Dm7, Dm9, Dsus4…).
- degré V : accords dont la fondamentale est Sol (G, G7, G9, Gsus4…).
Donc, une suite ii-V-I en Do majeur pourra être par exemple Dm7|G7|CM7|CM7 (en redoublant le dernier accord pour faire 4 mesures).
Pour trouver facilement les différents endroits du manche où l’on peut jouer ces 3 degrés, il sufit de savoir où se trouvent les trois fondamentales…
Les fondamentales des degrés I, ii et V sur le manche de la guitare
Le schéma ci-dessous représente tous les emplacements possibles des intervalles de seconde et de quinte par rapport à une fondamentale de référence :
Cette représentation synthétique sera très pratique une fois que vous aurez compris comment l’utiliser.
Pour le prendre en mains, voyons quelques exemples, avec des accords utilisés en Jazz.
Exemple 1 en Do majeur
On va donc se référer à la ligne “Do” du tableau d’harmonisation ci-dessus.
Prenons la suite d’accords Dm7 (ii), G7 (V) et CM7 (I).
Décidons de jouer la version de Dm7 suivante :
Sa fondamentale, la note Ré, est donc en case 5 sur la corde de La (corde n°5).
Evidemment, cela implique de connaître le nom des notes sur le manche. Ou d’avoir sous la main un schéma des notes sur le manche tel que celui-ci, où l’on peut identifier, entre autres, tous les emplacements de la note Ré (et notamment en case 5 sur la corde n°5) :
Où peut-on jouer les deux autres accords ? Il suffit de picorer dans le schéma des intervalles. Par exemple, choisissons cette zone du manche :
Puisque l’accord que nous voulons jouer est en case 5, cela implique que le point vert de l’intervalle de seconde sur le schéma ci-dessus sera en case 5. Les deux autres intervalles seront donc logiquement en case 3 :
Ce schéma permet de bien visualiser le fait que :
- CM7 est le degré I : accord dont la fondamentale est identique avec la tonique de la gamme (note Do dans les deux cas).
- Dm7 est le degré ii : accord dont la fondamentale est la seconde de la gamme (note Ré).
- G7 est le degré V : accord dont la fondamentale est la quinte de la gamme (note Sol).
Voici donc un premier exemple de suite 2-5-1 :
On pourrait bien sûr choisir d’autres diagrammes ou prendre CM7 ou G7 comme point de départ sur le manche, plutôt que de Dm7. Si par exemple on avait d’abord choisi CM7 joué en case 3, alors on en aurait déduit que Dm7 serait en case 5.
Au lieu de partir d’un diagramme, vous auriez pu commencer par choisir dans quelle zone du manche vous souhaitez jouer. Si jouez en Do majeur, la fondamentale du degré I sera donc Do. Vous pouvez décider d’abord de l’emplacement de cette fondamentale : par exemple, en case 3. Dans ce cas, Do sera sur la corde n°5 (corde de La).
Il ne vous reste plus qu’à repérer sur le schéma des intervalles l’endroit où il y a une fondamentale sur la corde n°5 et en déduire les emplacements possibles des fondamentales des degré ii et degré V :
On peut vérifier que :
- la fondamentale du degré I coïncide bien partout avec la note Do,
- la fondamentale du degré ii coïncide bien partout avec la note Ré
- la fondamentale du degré V coïncide bien partout avec la note Sol.
Dans les exemples qui suivent, nous en resterons à la première option (partir d’un des trois accords) mais vous pourriez bien sûr adopter cette seconde approche dans tous les cas…
Exemple 2 en Mi majeur
On va donc se référer à la ligne “Mi” du tableau d’harmonisation ci-dessus.
Prenons la suite d’accords F#m7 (ii), B7 (V) et EM7 (I).
Cette fois, on va partir du degré I et choisir de jouer la version de EM7 suivante :
Sa fondamentale, la note Mi, est donc en case 2 sur la corde de Ré (corde n°4).
Vérifiez-le sur le schéma des notes sur le manche :
Où peut-on jouer les deux autres accords ? Il suffit, encore une fois, de choisir dans le schéma des intervalles une zone compatible et d’en déduire quel type de diagramme on peut y placer. Par exemple :
Ce schéma permet encore une fois de visualiser le fait que :
- EM7 est le degré I : accord dont la fondamentale est identique avec la tonique de la gamme (note Mi dans les deux cas).
- F#m7 est le degré ii : accord dont la fondamentale est la seconde de la gamme (note Fa#).
- B7 est le degré V : accord dont la fondamentale est la quinte de la gamme (note Si).
Voici donc notre second exemple de suite 2-5-1 :
Exemple 3 en Bb majeur
On va donc se référer à la ligne “Sib” du tableau d’harmonisation ci-dessus.
Prenons la suite d’accords Cm7 (ii), F7 (V) et BbM7 (I).
Choisissons de jouer la version de BbM7 suivante :
Sa fondamentale, la note Si, est donc en case 6 sur la corde de Mi grave (corde n°6).
Vérifiez-le sur le schéma des notes sur le manche :
Où peut-on jouer les deux autres accords ? Il suffit, à nouveau, de choisir dans le schéma des intervalles une zone compatible et d’en déduire quel type de diagramme on peut y placer. Par exemple :
Ce schéma permet de visualiser le fait que :
- BbM7 est le degré I : accord dont la fondamentale est identique avec la tonique de la gamme (note Sib dans les deux cas).
- Cm7 est le degré ii : accord dont la fondamentale est la seconde de la gamme (note Do).
- F7 est le degré V : accord dont la fondamentale est la quinte de la gamme (note Fa).
Voici donc notre troisième exemple de suite 2-5-1 :
Conclusion
Grâce au schéma des intervalles de fondamentale, seconde et quinte, vous pouvez retrouver 100% des enchaînements 2-5-1 possibles sur un manche de guitare.
Cela permet de tester différentes sonorités selon l’endroit du manche où l’on se place et de choisir des doigtés permettant un enchaînement le plus fluide possible.
Pratique, non ?
très bien